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Contes du jour et de la nuit

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Contes du jour et de la nuit
Maupassant, de Guy
Par Julie Cartier


Nationalité de l'auteur : Française
Genre : Contes et récits
Courant : Réalisme
Siècle : 19e siècle
Groupe d'âge visé : Collégial
Auteur de la séquence : Julie Cartier
Date du dépôt : Automne 2008


La séquence didactique proposée ici est élaborée pour une classe d’étudiants au collégial, mais elle pourrait sûrement être adaptée pour l’école secondaire. La compétence visée par le cours 601-102-04 est : expliquer les représentations du monde contenues dans des textes littéraires de genres variés et de différentes époques. C’est dans cet esprit que cette séquence de 16 heures a été formée.

 

Choix de l’œuvre : Guy de Maupassant est un des grands noms français que l’on ne peut passer sous silence dans le cours Littérature et imaginaire du collégial, qui touche généralement les XIXe et XXe siècles. Cet auteur est beaucoup étudié au secondaire avec La maison Tellier, le Horla et Bel-Ami. C’est une des raisons qui m’ont poussée à choisir les Contes du jour et de la nuit[1], publiés en 1885. Puis, j’ai préféré un recueil d’histoires courtes à un roman parce qu’il me semble que c’est plus facile pour le lecteur. Les thèmes se développent moins dans une gradation en profondeur que par accumulation. Ce qui est intéressant aussi dans ce genre est qu’aussitôt installés dans l’histoire, les lecteurs découvrent la chute. Ainsi, l’intrigue ne paraît pas interminable et la motivation de lecture tient bon. Dans les Contes du jour et de la nuit, il y a une panoplie de sujets : farce, vengeance, infidélité, meurtre, imbécillité, relation amoureuse, etc. Parmi les vingt et un contes, l’étudiant en favorisera certainement quelques-uns selon ses goûts et ses intérêts. Cela donnera lieu à des discussions fort enrichissantes. Avec cette œuvre, les étudiants parviendront à saisir et à expliquer la vision du monde des Réalistes.

 

Objectifs : Les objectifs d’apprentissage que je poursuis en mettant cette oeuvre à l’étude sont nombreux, mais complémentaires. Les étudiants développeront leur capacité de lecture, d’analyse et d’interprétation. Ils devront comprendre le texte, puis pousser plus loin en y découvrant l’implicite. La séquence didactique construite autour de ces contes permettra à l’étudiant de comprendre les spécificités de ce genre. Avec les activités proposées, je veux qu’il en vienne à distinguer les caractéristiques du courant réaliste. Finalement, le lecteur devra être apte à s’exprimer sur l’œuvre.

 

Le problème : Les étudiants devront reconnaître l’appartenance des Contes au courant réaliste. Je veux qu’ils replacent l’œuvre dans son contexte. Il faudra qu’ils puissent expliquer en quoi l’écriture de Maupassant est attachée au courant et en quoi elle est particulière. Ce problème de lecture est fort réalisable, mais il faudra le résoudre étape par étape.

 

Avant la lecture : (6h)

Il est très important de préparer les étudiants à la lecture de l’œuvre proposée. Il faut prendre le temps de « réduire l’étrangeté du livre[2] ». Je verrai avec eux les notions d’auteur, d’éditeur, de titre, de genre, de recueil et de préface. J’interrogerai d’abord leurs connaissances antérieures sur le genre du conte. La Fontaine, Anderson, Grimm, Perrault, Fred Pellerin et d’autres seront sollicités. Ainsi, les étudiants se rendront compte que, même très jeunes, ils ont été en contact avec des contes littéraires. Sous forme de réflexion et de lecture collectives, ils découvriront l’évolution de la tradition du conte au Québec et ailleurs. Mon but est aussi qu’ils saisissent la part importante d’oralité que le genre exploite.

 

Nous nous attaquerons ensuite aux schémas narratifs et actantiels en atelier. Ces notions me semblent essentielles dans la mesure où elles servent d’aide à la synthèse. Ils travailleront sur des extraits de Madame Bovary de Flaubert, du Père Goriot de Balzac et de La curée de Zola pour, déjà, se familiariser avec le courant. Les étudiants vont apprendre en faisant. Ils acquerront mieux les outils proposés en pratiquant leur utilisation. « C’est une pédagogie qui va du concret vers l’abstrait, du tout vers les parties ; elle contraste donc avec la passivité "d’être enseigné"[3] ». De toute façon, ces notions théoriques ont généralement été vues au secondaire et sont donc des rappels. De plus, je veux qu’ils fassent eux-mêmes des liens entre les textes de ces auteurs. Je verrai à ce qu’ils comprennent qu’un conte peut être réaliste et qu’il ne renferme pas toujours une morale. Cette activité peut être faite en équipe de deux ou individuellement et je circulerai dans les rangées pour surveiller son déroulement.

 

Quand j’aurai la certitude qu’ils auront compris le concept du genre, je présenterai les Contes. Étant donné que la préface semble boudée par les lecteurs non experts, je lirai en partie celle de Pierre Reboul en classe. J’espère que les étudiants saisiront que le préfacier donne des indices sur la lecture à faire, qu’il aide le lecteur à entrer dans l’œuvre. Les citations de Maupassant tirées de différentes sources sont éclairantes. La chronologie de l’édition Folio est aussi intéressante d’un point de vue pédagogique. Que l’étudiant connaisse la biographie et la bibliographie de Maupassant n’est pas une fin en soi. Cependant, pour qu’il puisse reconnaître l’appartenance de l’œuvre au courant réaliste, il doit avoir une idée des enjeux de la fin du XIXe siècle. Pour que mes étudiants soient encore plus prêts à la lecture des Contes, je préparerai un glossaire des mots vieillis ou plus difficiles qu’ils contiennent. La liste contiendra des mots comme « relevée », « besogne », « cocher » et « fourreau ». J’interrogerai les jeunes sur la signification de ces mots et nous engendrerons des définitions ensemble qu’ils pourront écrire sur leur feuille. Ce sera l’occasion de les mettre dans l’ambiance de l’époque. J’espère ainsi qu’ils seront motivés et qu’ils se sentiront compétents en face de la lecture à effectuer.

 

Pendant la lecture : (6h)

Pour m’assurer que le premier tiers des contes est lu et compris, j’organiserai une réflexion en équipe de quatre étudiants. Ils seront alors libres de donner leur point de vue sur les premiers contes. Puis, nous reviendrons en grand groupe sur les liens à faire entre la vie, les thèmes et le style de Maupassant. Je validerai les impressions qu’ils ont eues sur le texte. J’apporterai des coupures numérisées des journaux de l’époque pour aborder le travail de journalisme de Maupassant et comment cela se voit dans son écriture fictive. C’est important que cette activité se fasse en équipe pour que les lecteurs soient confrontés à d’autres idées qu'aux leurs.

 

Au cours de la séance suivante, chaque équipe travaillera sur un conte que j’aurai sélectionné. J’écrirai des pistes d’analyse au tableau: description du personnage, du lieu, de l'action. Chaque équipe fera part de ses trouvailles sur son conte à toute la classe. Les étudiants élaboreront ainsi les premiers balbutiements d’une argumentation cohérente. Une fois que les thèmes de la mort, de la traîtrise, de la bestialité et du malheur auront été trouvés par les jeunes, je pourrai leur montrer comment ils s’accordent avec la pensée des Réalistes.

 

Ensuite, je verrai à sensibiliser les lecteurs dans leur rapport au langage. Il faudra les amener à distinguer le fond de la forme et les liens qu’ils nourrissent. Nous analyserons les hypothèses de lecture que les jeunes ont exprimées. Je les aiderai à intellectualiser leur expérience. Il est primordial pour moi de laisser de la place aux lectures plurielles. Seulement, pour relever le défi intellectuel que je leur ai proposé, ils doivent apprendre la lecture littéraire. « Avant de pouvoir jouer, il faut évidemment connaître les règles du jeu et ses formes, et savoir qu'on les connaît; avant de jouer à la littérature, il faut savoir bien lire[4]. » Après avoir reconstruit le récit pour leur compréhension, ils doivent donner un sens à leur lecture des Contes. Je veux montrer à mes étudiants comment je lis en tant qu’enseignant de littérature. Il ne s’agit aucunement de leur enlever leur première lecture par laquelle ils s’identifient aux personnages et aux histoires. Je veux qu’ils en viennent à valider eux-mêmes leur lecture au fur et à mesure. Pour ce faire, je lirai un passage en classe et poserai des questions sur la narrattion, sur le thème principal et sur le style. Je veux que le groupe et moi réfléchissions à voix haute pendant la lecture de l'extrait choisi. Bref, je souhaite que les jeunes comprennent que le remue-méninges et le questionnement font partie d'une analyse littéraire complète.

 

Après la lecture : (4h)

En devoir, les étudiants liront quelques pages extraites de La bête humaine de Zola. J’expliquerai brièvement la différence entre réalisme et naturalisme, mais je ne veux pas encombrer l’esprit des jeunes lecteurs avec cela. Ils pourront comparer le texte à l’adaptation cinématographique de Renoir lors de son visionnage  [5] . Le film est pratique, car il recoupe l’essentiel de l’œuvre à l’intérieur d’une heure. De plus, les jeunes apprécient beaucoup le septième art. Ils verront qu’un film peut être regardé avec des lunettes de littéraire. Pendant le visionnage, les étudiants rempliront un questionnaire formatif. Ils devront le réutiliser pour la rédaction d’une comparaison entre les Contes et le film de La bête humaine. Ce questionnaire sera corrigé en grand groupe dès la fin du visionnage.

 

Le texte comparatif devra compter une introduction, un paragraphe de ressemblances, un autre de dissemblances, et une conclusion. Cela leur aura été préalablement expliqué. Ils auront une séance de deux heures pour effectuer ce travail. Ils auront droit à l’œuvre principale et aux extraits appropriés, car je ne vise pas à ce qu’ils retiennent l’information, mais à ce qu’ils sélectionnent la plus adéquate. Pendant une séance où nous lirons des parties du texte ensemble, je leur aurai rappelé comment se fait une citation.

Cet exercice sera corrigé formativement par l’enseignant. Je le considère comme une pratique d’écriture avant la dissertation sommative qui aura sûrement comme sujet l’appartenance de l’œuvre au courant réaliste. L’étudiant aura ainsi de la rétroaction sur son travail avant d’être évalué de manière sommative.

 


[1] Guy de Maupassant, Contes du jour et de la nuit, Paris, Gallimard (Folio), 1984, 283 p.

[2]  Dominique Ledur, « Lecture littéraire et enseignement professionnel : faut-il former des " héritiers"? ». Dans Pour une lecture littéraire 2, Bilan et confrontations. Actes du colloque de Louvain-la-Neuve (mai 95), 1996, p. 335.

[3] Gilles Chamberland et Guy Provost, Jeu, simulation et jeu de rôle, Sainte-Foy, Presses de l'Université du Québec, 1996, p. 42.

[4] Michel Picard, La lecture comme jeu, Paris, Les éditions de Minuit, 1986, p.308.

[5] Jean Renoir, La bête humaine, Les Hakim et Paris Film, 1938, 98 min.


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