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Cendres de cailloux

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Cendres de cailloux
DANIS, Daniel
Par Fannie Buteau-Paré


Nationalité de l'auteur : Québécoise
Genre : Théâtre
Courant :
Siècle :
Groupe d'âge visé : Collégial
Auteur de la séquence : Fannie Buteau-Paré
Date du dépôt : Automne 2011


Tout d’abord, il convient de justifier la pertinence de la pièce de théâtre Cendres de cailloux de Daniel Danis pour le cours de Littérature québécoise du collégial. En fait, la compétence à atteindre au terme de ces quinze semaines est la suivante : « Apprécier des textes de la littérature québécoise [1]». Puisque le dramaturge étudié est d’origine québécoise et qu’il s’inscrit en plein dans la trajectoire du courant postmoderne théâtral, ce texte correspond aux exigences du troisième cours de la formation générale en français. Sur le plan des acquis cognitifs, entre autres, l’étudiant sera en mesure « de reconnaitre des procédés littéraires et langagiers et d’en apprécier la contribution dans le projet d’un texte [2]» et aussi, sur le plan de l’héritage culturel, « d’apprécier les représentations du monde qu’offrent les textes littéraires et de se situer par rapport à elles [3]». La reconnaissance des particularités d’une œuvre et l’adoption d’un point de vue critique sont en plein dans la lignée des aptitudes visées par le Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport. 

 

D’un point de vue littéraire, Daniel Danis est un excellent choix puisqu’il est l’un des dramaturges québécois les plus reconnus à l’international. Son théâtre, intense et poignant, plonge aux confins de la nature humaine, dans ce qu’elle a de plus affreux et de plus beau.

 

Cette œuvre dramatique est intéressante à exploiter sous différents angles. La polyphonie des voix est fascinante, puisque le lecteur a accès à l’intimité de quatre personnages à la fois, qui n’interagissent jamais réellement entre eux. Le langage, cru et poétique en même temps, est très imagé, ce qui constitue un atout, mais aussi une difficulté. Le récit n’est pas réellement vécu par les personnages, il est plutôt narré par ceux-ci, et ce, de manière asymétrique. De plus, l’espace est le symbole de l’intériorité des personnages, comme s’ils pouvaient le modeler au fur et à mesure. Ce texte comporte plusieurs zones floues qui génèreront des conflits sociocognitifs susceptibles d’amener à résoudre un problème par l’intermédiaire des pairs et de l’enseignant.

 

Les objectifs d’apprentissage poursuivis sont les suivants :

 

  • S’approprier le langage et les personnages de Daniel Danis et se familiariser avec la structure par monologues du récit.
  • Maitriser le vocabulaire de la dramaturgie (didascalie, monologue, aparté, tirade)…
  • Inscrire le texte dans un courant littéraire et un contexte sociohistorique.
  • Différencier les multiples branches de l’écriture scénique (direction d’acteurs, scénographie, éclairages, son, etc.)
  • Développer une vision d’ensemble et une interprétation singulière de l’œuvre.

 

La création d’une situation problème qui englobe ces buts est appropriée pour ancrer un travail d’équipe dans un contexte bien défini qui orientera les élèves dans leur lecture[4]. Pour faire comprendre aux étudiants que le texte de théâtre n’est que la partition d’un art vivant, cette mise en situation est axée sur le volet de la mise en scène. Avec l’aide de trois ou quatre collègues, l’étudiant construira une proposition d’écriture scénique cohérente qui rendra justice à l’articulation, au contenu et à la forme de l’œuvre[5]. Par le fait même, il confrontera son interprétation personnelle à celle des autres membres de l’équipe. Lors d’un consensus, ils devront arriver à dégager une vision globale du texte qui sera travaillé sur quatre volets qu’ils se seront divisés au préalable, soit la scénographie, la mise en place et la direction d’acteurs, l’environnement sonore et l’éclairage : « L’enjeu est de voir dans la « lecture spectaculaire » une « lecture-médiatrice » du texte et de découvrir dans la « mise en mouvement » du texte « des lieux de lecture»[6].».

 

La personne qui s’occupera de la direction d’acteurs et de la mise en place devra faire le choix d’environ dix monologues de Cendres de cailloux et y ajouter des didascalies qui feront office d’indications scéniques fictives aux comédiens, puisque la pièce ne sera pas véritablement jouée. Ces repères seront de l’ordre des déplacements, du niveau de jeu désiré, de l’émotion recherchée, etc. Ce travail permettra d’ancrer les personnages dans un corps et de leur donner une voix qui leur est propre dans un esprit de « co-construction du sens du texte [7]».

 

L’élève responsable de la conception sonore devra, lui aussi, sélectionner dix monologues et les exploiter de manière sonore, par l’ajout de musique sans paroles, de bruits de fond, de sons effectués par les comédiens, etc. Il devra toujours veiller à la création d’une ambiance qui vienne enrichir le texte et l’appuyer.

 

Une autre dimension importante, qui pourrait être travaillée à deux dans le cas d’une équipe de cinq, est la scénographie. Il s’agit de travailler l’aspect visuel par l’entremise obligatoire d’une esquisse de décor et facultative d’un croquis de costumes ou d’une affiche promotionnelle. Ce travail permettra de mieux cerner l’espace diégétique dans lequel évoluent les personnages de Danis.

 

Finalement, le dernier coéquipier devra proposer, toujours selon les mêmes dix monologues choisis en équipe, un plan du dispositif d’éclairages nécessaire en annotant lui aussi les marges du texte afin de fournir des précisions sur la lumière, les projections vidéos ou encore les ombres chinoises. Ces choix permettront de mettre l’accent sur certains éléments et d’en mettre d’autres de côté, au profit d’une plus grande homogénéité dans la mise en scène.

 

Avant la lecture : créer un horizon d’attentes chez les étudiants

 

Semaine 1 :

 

Activité 1 (une heure) : Étude du paratexte (comportant le glossaire avec les québécismes, la dédicace, la postface, la brève description des personnages et la didascalie initiale) et observation de la présentation matérielle du livre (monologues avec titres qui se présentent sous la forme d’un recueil de nouvelles).

 

Les étudiants ont une liste d’aspects (décrits ci-haut) à observer en équipe de deux. Ils doivent les détailler brièvement sur une feuille (deux lignes par élément). Ensuite, il y a une plénière où le professeur les interroge sur leurs réponses et leur pose les questions suivantes sans imposer de ligne directrice[8] :

  • Selon vous, s’agit-il d’un recueil de nouvelles, d’une pièce de théâtre ou de la poésie en prose?
  • Pourquoi n’y a-t-il pas d’illustrations sur la couverture?
  • Qu’est-ce qu’évoque le titre selon vous?
  • Pourquoi y a-t-il un titre pour chacun des monologues?

 

Activité 2 (une heure) : Observation d’affiches et de photographies de la pièce Cendres de Cailloux et lecture de trois critiques journalistiques[9] au moment des premières représentations. Cette activité permet d’accoler des images au texte et de tenir compte de la réception du public face à une proposition dramaturgique. Le professeur divise les étudiants en trois sous-groupes qui alternent entre plusieurs plateaux rotatifs : affiches posées au mur, photographies projetées sur un écran blanc et critiques surlignées disposées sur les tables.

 

Activité 3 (une heure) : Lecture à haute voix par le professeur de deux monologues qui présentent la situation initiale du récit (Un port d’attache p. 12 et Laver l’intérieur p.15). Discussion en grand groupe autour de ces deux textes afin de déterminer les impressions et les représentations initiales des élèves sur les thèmes, l’esthétique privilégiée et ce à quoi ils s’attendent comme difficultés de lecture.

 

Activité 4 (une heure) : Explication de la situation problème et formation des équipes de quatre selon les intérêts de chacun (scénographie, environnement sonore, etc.). Si les élèves sont au courant du projet dès le départ, ils tiendront compte de leurs tâches respectives tout au long de la lecture. Ainsi, ils s’investiront totalement dans chaque activité, en sachant qu’elles font partie d’un tout cohérent. Explication du devoir pour la semaine prochaine : lire les trente premières pages de la pièce en surlignant les passages symboliques qui font sens pour eux. De plus, pour chaque monologue, ils devront écrire le lieu, le temps et un résumé de l’action pour une éventuelle reconstitution de la chronologie et du récit sous-jacent aux narrations (les étudiants devront lire chaque semaine trente pages et appliquer le même processus jusqu’à la fin de la lecture (semaine 4).

 

Pendant la lecture : fournir les outils pour s’approprier l’œuvre de Danis

 

Semaine 2 :

 

Activité 5 (une heure) : Le vocabulaire de la dramaturgie

 

Les étudiants auront une feuille d’associations à remplir entre des termes et des définitions que nous allons travailler au cours de la période (didascalie, aparté, réplique, etc.). Cela leur permettra de réactiver leurs connaissances antérieures et de vérifier par la suite s’ils avaient vu juste. Le professeur écrira aussi les définitions d’autres mots importants au tableau tels que : protagoniste, mise en abyme, climax, deus ex machina, côté cour/jardin, etc. Pour leur expliquer la différence entre une tirade et un monologue, le professeur fera écouter aux étudiants la version audio d’un monologue d’Harpagon de l’Avare de Molière, ainsi que la tirade du nez de Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand[10]. Cette activité permettra aux étudiants d’employer les termes propres à la discipline lorsqu’ils veulent décrire ou analyser une œuvre théâtrale.

 

Activité 6 (une heure) : Présentation du documentaire sur Antigone de Sophocle[11], présenté au Trident dans une mise en scène de Brigitte Haentjens Celui-ci met en relief la démarche artistique derrière chaque branche d’une production théâtrale à Québec. Par exemple, on peut y voir la responsable des costumes parler du choix des tissus pour leur texture en laine fibreuse qui représente bien la transparence des personnages. Il est important pour les étudiants d’être témoins d’une telle démarche afin qu’ils comprennent que rien n’est laissé au hasard lors du processus de création. Tout le mérite du succès d’une pièce ne revient pas nécessairement aux comédiens, mais aussi à tous ces gens en coulisses, qui ont réfléchi au sens du texte et qui ont élaboré ensemble une vision d’un texte dramatique.

 

Activité 7 (une heure) : Avec l’aide des étudiants, le professeur fera un tableau comparatif entre les tâches du dramaturge, qui écrit la pièce[12], et du metteur en scène, qui la met en relief[13], comme dans une carte de souhaits à trois dimensions. Ensuite, il les interrogera sur les incidences des choix artistiques de chacun et leur complémentarité[14].

 

Activité 8 (une heure) : Discussion autour des différents acteurs qui participent à la mise sur pied d’une représentation théâtrale (scénographes, concepteurs de son et d’éclairages, etc.). Le professeur effectuera un survol avec les étudiants du tableau de Tadeus Kowsan sur les treize systèmes de signes au théâtre[15] regroupés en cinq catégories soit le texte prononcé, l’expression corporelle, les apparences extérieures de l’acteur, l’aspect du lieu scénique et les effets sonores non articulés. Cette activité doit se faire tôt étant donné que les étudiants assignés à chacune des tâches seront plus en mesure de centrer leur attention, durant la lecture progressive de l’œuvre, sur des éléments à exploiter :

 

Le texte de théâtre appelle ainsi un mécanisme de « spectacularisation », puisque le lecteur doit « faire scène » pour concevoir les possibles du texte, les personnages, les situations, les espaces dans lesquels ils évoluent, puisqu’il doit « simuler » des gestes, des mouvements, des perceptions pour éclairer le texte. Par ailleurs, le lecteur peut jouer tous les rôles : dramaturge, comédien, metteur en scène, scénographe…pour fabriquer sa propre production théâtrale imaginaire[16].

 

Semaine 3 :

 

Activité 9 (deux heures) : Comparaison des personnages avec des animaux et repérage de preuves textuelles Pour explorer les thèmes de l’animalité et de la brutalité le professeur demandera à ses étudiants de faire cet exercice formatif individuellement et par écrit (ainsi, il pourra les commenter plus tard). Par la suite, ils confronteront leurs réponses avec celles des membres de leur équipe afin d’arriver à s’entendre sur des éléments clés à faire ressortir de chaque personnage et de son rapport à la nature[17]. Cet exercice servira à faire prendre conscience que l’instinct et les pulsions sont omniprésents chez les personnages.

 

Activité 10 (une heure) : Visionnage d’extraits de L’arracheuse de temps[18] (spectacle de Fred Pellerin). Cette vidéo sert de prétexte pour étudier la narration dans la pièce. Il est primordial d’inscrire l’œuvre de Danis dans la tradition orale québécoise afin que les élèves aient d’autres repères culturels nationaux et qu’ils puissent repérer les similitudes entre ceux-ci[19]. Il y aura également une discussion autour de la polyphonie des voix dans Cendres de Cailloux et sur les effets de ce procédé littéraire nommé la focalisation chez le lecteur/spectateur.

 

Activité 11 : (une heure) : Lecture individuelle du texte de Patricia Belzil Le rituel de la vie : «Cendres de cailloux »[20] qui analyse et commente deux mises en scène de l’œuvre, celle de Louise Laprade à l’Espace GO à Montréal et celle de Gill Champagne au Périscope à Québec.

 

Les élèves pourront avoir un aperçu des points forts et des points faibles de chacune, tout en s’inspirant pour leur projet final[21].

 

Semaine 4 :

 

Activité 12 (une heure) : Immersion dans le théâtre postmoderne au Québec et caractéristiques telles que l’éclatement et la fragmentation du récit, l’accès à l’intimité humaine, la contradiction, etc. L’enseignant pourrait nommer également quelques dramaturges qui font partie de ce courant, dont Wajdi Mouawad, avec sa trilogie de pièces : Littoral, Forêts et Incendies, qui mettent l’accent sur les drames intérieurs des personnages dans une esthétique épurée axée sur la sincérité et la vérité du jeu des comédiens. Il y a aussi Michel Garneau qui crée des textes magnifiques sur le plan formel, parfois sous forme de monologues entrecroisés comme dans la pièce Quatre à Quatre. Si le professeur préfère y aller dans une trame plus littéraire, le style de Danis pourrait être comparable à celui de l’auteure Anne Hébert[22]. Il est nécessaire d’ancrer l’œuvre à l’étude dans un contexte, si l’on veut comprendre ses influences, ce qui la distingue et ce qui la situe dans un ensemble.

 

Activité 13 (une heure) : Analyse en équipe des passages symboliques que les étudiants ont surlignés lors de la lecture et mise en commun des interprétations.

 

Daniel Danis : créateur de personnages écorchés, fantômes morts ou vivants qui sortent de l'ombre et se dressent dans la lumière de la scène pour dire leur impuissance ; porteur d'une langue en état d'urgence, où les mots, en déboulant, blessent et caressent tour à tour. Acres et venimeuses, onduleuses et sensuelles, vipères et couleuvres, les phrases de Danis, ponctuées selon une rythmique précise, sont celles d'un poète qui, comme le note la metteure en scène Louise Laprade, « ne voulait pas être lu dans les alcôves, mais entendu par les gens de la cité »[23].

 

Pour donner un exemple, l’enseignant analysera avec eux ce passage symbolique très riche : « Mon père avait la tête d’un bœuf / qui tirait une maison / avec une cave remplie de cailloux. [24]».  Il demandera ensuite à quelqu’un du groupe de lire La langue de la rage où le langage brutal et instinctif et de Danis est à son apothéose : « Sur le bord du garde-fou/sa bouche écumait parce qu’il criait/des mots dans une autre langue/sa langue de rage [25]» et aussi à la page 113 où il n’y a qu’un mot par ligne et que le lecteur sent que ceux-ci ne veulent plus rien dire pour le personnage. Il n’y en a pas qui sont suffisamment puissants pour exprimer toute sa détresse et son désespoir. De plus, il y a certaines analogies qui relèvent du complexe linguistique bien particulier des Québécois : «  J’ai de la haine pour un pays/qui en finit plus/d’être jamais un pays/Je nous souhaite de crever/avec sept tours de langue/dans la gorge/de s’étouffer avec notre langue [26]». Lors de cette activité, les étudiants seront amenés à confronter leur lecture à celle de leurs camarades de classe, ce qui leur permettra de confirmer ou d’infirmer des hypothèses et d’ajouter des couches de sens à leur interprétation.

 

Activité 14 (une heure) : remue-méninges pour le travail final À partir de l’activité précédente, les élèves devront choisir une dizaine de monologues et s’interroger sur la façon de les mettre en image et en mouvement sur scène.

 

Activité 15 (une heure) : Temps alloué pour la rédaction d’un texte de création[27] dont la lecture-jeu et la justification des choix[28] feront l’objet d’une évaluation sommative. Les étudiants devront adopter le point de vue d’un des quatre personnages du texte (Shirley, Coco, Clermont ou Pascale) et écrire un monologue d’une page dactylographiée où ce personnage décrira l’allure d’un autre personnage de la pièce et décrira une interaction avec celui-ci. L’intention derrière cela est de vérifier si l’étudiant est apte à faire état de sa lecture personnelle de la pièce et s’il a saisi les principaux nœuds interprétatifs contenus dans l’œuvre[29].

 

Après la lecture : réinvestir les apprentissages dans une situation problème

 

Semaine 5 :

 

Activité 16 (une heure) : reconstitution de la chronologie et résumé factuel de l’histoire Les étudiants devront reconstruire le récit à la manière d’un casse-tête en replaçant les quarante monologues dans le bon ordre (comme devoir, ils ont écrit le temps, le lieu et l’action de chacun) et ont identifié ce qui s’est passé avant la pièce, pendant et après. Les étudiants,  sous la supervision de l’enseignant, seront à même de saisir l’aspect cyclique de l’œuvre, qui oscille constamment entre  les saisons, la vie et la mort. Cette activité servira à l’acquisition de références communes en ce qui a trait au temps et au déroulement du récit, voilà pourquoi il est justifié de le faire au moment où les étudiants viennent de terminer la lecture.  À l’aide des étudiants, le professeur complètera un schéma actanciel  (destinateur, sujet, objet, destinataire, adjuvants, opposants, etc.) et discutera de la manière de découper le récit de Danis : de l’an 0 à l’an 6.

 

Activité 17 (une heure) : analyse de certains passages plus difficiles à interpréter dans l’œuvre Le professeur pourrait relire à haute voix quelques monologues qui font référence à la mythologie : L’Amazone sur un quatre-roues qui établit des parallèles entre Shirley et une femme guerrière, forte et combattante ou encore Un grand cri de désir où l’on sacrifie une vache comme dans les rituels grecs qui sont à l’origine du théâtre d’aujourd’hui où l’on vouait un culte au dieu du vin appelé Dionysos.  Aussi, l’animalité et l’instinct de survie des personnages pourraient être creusés plus en profondeur. Que veut-on dire par : « Les animaux en nous sont tous des rapides bouillants. [30]» ou encore qui est cette bête nommée Gulka qui prend vie et grandit dans le corps de Coco? Pourquoi sa mère lui dit-elle « C’est de toi que tu te sauves. [31] »? Dans le monologue Un homme à sec l’animal a-t-il réussi à prendre le dessus sur l’homme [32]?  Dans un autre ordre d’idées, cette œuvre dramatique balance constamment entre l’illusion du rêve et le dur fracas de la réalité qui fouette en plein visage. Pour en parler, le professeur pourrait évoquer le personnage de Pascale, qui passe rapidement de la  jeune pucelle à l’amante désillusionnée dans Un cœur vierge ou encore la citation suivante : « la vie vaut pas assez la peine/que tu meures pour elle [33]». Le professeur pourrait aussi interroger les étudiants sur la symbolique du tatouage de Shirley et sur les propriétés de son médaillon soulignés dans Le talisman, entre autres, qui en révèlent beaucoup sur la nature de sa relation avec Clermont.

 

Activité 18 (deux heures) : rencontres d’équipe pour l’évaluation de la lecture jeu Chaque étudiant devra lire sa création devant ses coéquipiers qui lui feront des commentaires constructifs autant sur l’orthographe, la syntaxe, la grammaire que sur le contenu pour une éventuelle réécriture (devoir pour la semaine suivante). Il parlera brièvement de sa ligne directrice et mettra en lumière des éléments qu’il a puisés dans le texte pour en arriver à écrire son monologue (langage, thèmes, temporalité, etc.)[34].

 

Semaine 6 :

 

Activité 19 (une heure) : projection PowerPoint de quelques textes de création anonymes En grand groupe, il y aura une discussion autour des questions suivantes :

 

  • En quoi ce texte est-il fidèle à Cendres de cailloux?
  • Qu’est-ce qu’il nous apprend de plus sur la vision du monde de Danis?
  • Êtes-vous d’accord avec cette proposition ou aviez-vous interprété le texte autrement?

 

Activité 20 (trois heures) : temps libre pour du travail d’équipe sur le projet final

 

*** Le devoir de la semaine pourrait être d’aller voir une pièce de théâtre postmoderne à l’affiche dans la région de Québec, soit au théâtre Premier Acte ou au Périscope, qui sont des établissements où une grande place est laissée au théâtre expérimental et contemporain.

 

Semaine 7 :

 

Activité 21 (quatre heures) : rencontres d’équipes avec le professeur pour constater l’avancement du projet. L’enseignant discutera avec chaque membre de sa portion du travail et réajustera le tir au besoin. Ensuite, il veillera à la cohérence de l’ensemble de la proposition de mise en scène[35].

 

*** Si l’on en a la chance, à cette étape du projet, nous pourrions recevoir pour une heure le metteur en scène ou un autre artisan de la pièce que les étudiants seraient allés voir la semaine précédente. En entendant un expert se prononcer sur le sujet et en lui faisant part de leurs interrogations, les étudiants se sentiront plus en confiance face à leurs idées et leurs initiatives pour le travail final.

 

Semaine 8 :

 

Activité 22 (quatre heures) : présentations orales des projets de mise en scène Les équipes ont environ vingt minutes pour expliquer l’essence du projet, la singularité de leur interprétation et les éléments qu’ils ont choisi de traiter et ceux qu’ils ont mis de côté (cinq minutes) Ensuite, chaque membre de l’équipe devra résumer sa démarche et justifier la pertinence de ces choix en lien avec l’unité du spectacle (quinze minutes en tout ou trois minutes par personne). Le reste de la classe aura également la chance de commenter et de questionner les élèves à la fin de l’exposé. Une fois tout cela terminé, l’équipe devra remettre un travail écrit sommatif d’environ dix pages qui réunira chacune des parties de la mise en scène avec les monologues annotés, les esquisses de décors et de costumes, l’affiche, la trame sonore, ainsi que les commentaires justificatifs. Pour terminer, il y aura une autoévaluation du travail d’équipe par l’étudiant et par ses pairs.

 

*** Cette séquence comportant beaucoup d’activités pourrait paraitre volumineuse et ardue à exécuter pour certains enseignants. Par conséquent, il est possible d’enlever les activités 2, 7, 10, 14 et 19 sans trop compromettre l’apprentissage des étudiants.

 

                                                                                            


Bibliographie :

 

Antigone, documentaire réalisé par Maurice Roberge et diffusé sur les ondes de Radio-Canada le 16 mars 2003.

Barrière, N. (2011), Lire le texte de théâtre ou «l’insurrection du texte»: dispositifs de «lecture spectaculaire». Dans Revue pour la recherche en éducation. Actes du colloque «La lecture sous toutes ses formes: pluralité des supports, des processus et des approches.» 78e congrès de l’ACFAS, Montréal, 11 mai 2010, p.72-83.

Belzil, P. [érudit.org] «Le rituel de la vie: «Cendres de cailloux», Jeu: revue de théâtre, no.70, 1994, p.104.

Danis, D. Cendres de cailloux, Leméac, Actes Sud, Montréal, 1992.

Dufays, J-L., Gemenne, L. & Ledur, D. [2005], «Le processus de lecture». Dans Pour une lecture littéraire: histoire, théories, pistes pour la classe (Chapitre 5, p.109-123). Bruxelles: De Boeck.

http://www.elisabethlocas.com/pdf/cailloux.pdf (consulté le 10 décembre 2011)

http://www.mels.gouv.qc.ca/ens-sup/ens-coll/Cahiers (consulté le 10 décembre 2011)

Falardeau, É. et Carrier, L.-P. [2006] Exploiter l’interactivité d’Internet avec les enseignants en formation dans la production de séquences didactiques. Recherches, no 44, p.143-162.
Kowsan, T. Le signe au théâtre, Éditions Mouton, Paris, 1975, p.49.

Pagé, M. [2004], Quand un problème devient fantastique, Pédagogie collégiale, 18(1), p.4-7.
Pellerin, F. L’arracheuse de temps, Production Micheline Sarrazin INC, avril 2011, français.
Petitjean, A. [2005]. Écriture d’invention au lycée et acquisition de savoir et de savoir-faire. Pratiques, no.127/128, p.75-96.

Tauveron, A.-M. [2005] Le commentaire justificatif après l’écriture d’invention ou travailler la prise de distance avec son texte. Pratiques, no 127/128, p. 113-132.

http://http://www.litteratureaudio.com/

http://www.etudes-litteraires.com

 


[1] http://www.mels.gouv.qc.ca/ens-sup/ens-coll/Cahiers/cours-comp/comp.asp?NoObj=0003.

[2] http://www.mels.gouv.qc.ca/ens-sup/ens-coll/Cahiers/DescFG.asp

[3] Idem

[4] « Le processus de résolution se déroulera certes de façon individuelle, mais aussi de façon collective, pour favoriser les interactions langagières et leur participation à l’apprentissage ; les échanges entre pairs, les discussions, les débats sont autant de moyens qui amènent l’élève à apprendre à évaluer ses hypothèses de résolution dans la négociation. » (Falardeau, É. et Carrier, L.-P. [2006] Exploiter l’interactivité d’Internet avec les enseignants en formation dans la production de séquences didactiques. Recherches, no 44, p.147.).

[5] « Dans l’apprentissage par problèmes, les apprenants, regroupés par équipe, travaillent ensemble à résoudre un problème complexe généralement proposé par l’enseignant, problème pour lequel ils n’ont reçu aucune formation particulière, de façon à faire des apprentissages de contenu et à développer des compétences de résolution de problèmes. » (Mélanie Pagé [2004], Quand un problème devient fantastique p.4).

[6] Barrière, Nadine (2011), Lire le texte de théâtre ou « l’insurrection du texte » : dispositifs de «lecture spectaculaire», p.72.

[7] Idem, p.78.

[8] « Toute lecture commence par une phase de pré-réception où le lecteur se prépare à lire en mobilisant dans ses affects et sa mémoire des désirs et des codes présupposés qui permettent d’emblée d’accorder au texte sens et valeur. » (Dufays, J-L., Gemenne, L. & Ledur, D. [2005], Le processus de lecture, p.110.)

[9] http://www.elisabethlocas.com/pdf/cailloux.pdf (plusieurs critiques sont présentées sur ce site)

[10] http://www.litteratureaudio.com/ : la différence entre les deux est clairement visible sur le plan du destinataire, car un monologue est adressé à soi-même et traduit un état d’esprit, tandis qu’une tirade s’adresse bel et bien à un public présent sur scène.

[11] Antigone, documentaire réalisé par Maurice Roberge et diffusé sur les ondes de Radio-Canada le 16 mars 2003.

[12] « Sur le plan théorique, le texte de théâtre a été qualifié de texte « à trous » par Anne Ubersfeld, renvoyant par là à sa destination scénique latente. Il est donc présenté comme étant destiné à être joué sur scène par des comédiens.»

(http://www.etudes-litteraires.com/spectacle-theatral.php#ixzz1g59fhkd6)

[13] « Mettre en scène est un acte de création. Représenter, c’est manifester un regard intérieur qui révèle un rapport particulier au monde. D’où la nécessité de reconnaître dans une représentation, une inspiration poétique qui renouvelle le langage dramatique. » (Idem).

[14] « Ainsi, appréhender une représentation à travers la lecture du texte ou lire un texte dans une projection scénique risque de faire passer à côté de l’essence même de l’œuvre. Mais s’intéresser au rapport dialectique qui les lie semble une démarche juste et judicieuse. » (Idem).

[15] (La parole, le ton, les mimiques du visage, les gestes, le mouvement scénique de l’acteur, le maquillage, la coiffure, le costume, l’accessoire, le décor, l’éclairage, la musique et le bruitage) dans Tadeus Kowsan, Le signe au théâtre, Éditions Mouton, Paris, 1975, p.49.

[16] Barrière, Nadine (2011), Lire le texte de théâtre ou « l’insurrection du texte » : dispositifs de «lecture spectaculaire», p.73.

[17] « C'est toutefois la métaphore minérale qui est la clé de voûte de Cendres de cailloux. Roche, cailloux, cendres, poussière : les personnages définissent leur essence à travers les transformations de la pierre, solidifiée, fragmentée ou effritée, et ils atteignent leur vérité en communiant avec la nature, source généreuse de vie. » (Patricia Belzil [érudit.org] « Le rituel de la vie : «Cendres de cailloux», Jeu : revue de théâtre, no.70, 1994, p.104.)

[18] Fred Pellerin, L’arracheuse de temps, Production Micheline Sarrazin INC, avril 2011, français.

[19] « Intégrer, cela veut dire : 1) greffer des savoirs sur des savoirs antérieurs ; 2) structurer ou restructurer des savoirs ; 3) replacer des savoirs dans un contexte historique d’émergence ; 4) établir des relations entre des savoirs ; 5) transférer les savoirs, c’est-à-dire les appliquer à bon escient dans des contextes autres que ceux où on les a acquis ; 6) les mettre continuellement à jour pour relever les défis du présent. Dans tous les cas, intégrer, c’est faire des liens.» (Simard, D. [2004] Une approche culturelle dans l’enseignement du français langue première. L’écho du RÉS.E.A.U. Laval, 4[1], p.16.)

[20] Patricia Belzil, (érudit.org) « Le rituel de la vie : «Cendres de cailloux», Jeu : revue de théâtre, no.70, 1994, p.98-104.

[21] « Il n'est pas anodin que ces deux productions aient privilégié chacune un pôle de l'état des personnages. Dans le repos et l'agitation, le texte de Danis peut déployer son sens à loisir, car il trace, dans les cailloux ou les cendres, la destinée de l'Homme. »Idem, p. 104.

[22] « S'il fallait trouver des affinités littéraires à cette œuvre, c'est du côté d'Anne Hébert (la poète et la romancière) que j'irais, pour le cisèlement des phrases, l'économie des mots, les tensions manichéennes, les élans fatidiques de vie et de mort, pour, enfin, la lucidité cruelle du récit rétrospectif. » (Patricia Belzil, (érudit.org] « Le rituel de la vie : «Cendres de cailloux», Jeu : revue de théâtre, no.70, 1994, p. 98.).

[23] Ibid.

[24] Daniel Danis, Cendres de cailloux, Leméac, Actes Sud, p.24.

[25] Idem, p. 111.

[26] Idem, p.69.

[27] « Il apparaît aussi qu’un des enjeux majeurs de l’écriture d’invention est de provoquer un plus grand intérêt des lycéens pour l’enseignement du français, dans la mesure où ce type d’écrit  sollicite l’expérience du monde des élèves en leur donnant la possibilité de l’exprimer dans des genres et des registres diversifiés. » (Petitjean, A. [2005]. Écriture d’invention au lycée et acquisition de savoir et de savoir-faire. Pratiques, no.127/128, p.81.)

[28] « La première utilité du commentaire justificatif est de mettre l’élève à distance de la lecture qu’il a faite du texte qu’on lui a donné à amplifier, imiter, compléter etc. » (Tauveron, A.-M. [2005] Le commentaire justificatif après l’écriture d’invention […] Pratiques, no 127/128, p. 115.).

[29] « Les pratiques d’écriture peuvent consister soit à produire un texte qui en glose, commente, discute un autre, soit à produire un texte nouveau, autonome : l’écriture d’invention concerne le second cas. (elle) répond à trois objectifs : - permettre aux élèves de poursuivre leur apprentissage de cette compétence, difficile, mais nécessaire, de la maîtrise de l’expression écrite (…) – permettre aux élèves de s’approprier et de réinvestir des connaissances, en relation directe avec les perspectives d’étude et les contenus des programmes (…) – contribuer à la formation personnelle, par l’expérience de la mise en œuvre de la langue et des codes (…) et développer par là les facultés d’invention et d’imagination. (…) ». (Petitjean, A. [2005]. Écriture d’invention au lycée et acquisition de savoir et de savoir-faire. Pratiques, no.127/128, p. 76.)

[30] Daniel Danis, Cendres de cailloux, Léméac, Actes Sud, p.33.

[31] Idem, p.99.

[32] « Après, je criais/ Gulka! Attaque/Avec ses pattes d’élan/je l’entendais courir/dans le sentier de mes veines/ De sa gueule de carcajou/jaillissait un rugissement terrifiant/ Gulka sortait par mes yeux/il prenait ma place/Je devenais plus fort, plus grand/une sorte de dieu méchant. » Idem, p.85.

[33] Idem, p.114.

[34] « L’exercice se fonde […] sur une lecture intelligente et sensible du corpus, et exige du candidat qu’il se soit approprié la spécificité des textes dont il dispose (langue, style, pensée), afin d’être capable de les reproduire, de les prolonger, de s’en démarquer ou de les critiquer. […] ».
(http://www.etudes-litteraires.com/bac-francais/ecriture-invention.php#ixzz1gQocLGPo)

[35] « Il nous semble donc que l’activité du lecteur du texte de théâtre est à situer dans cet entredeux, un aller-retour entre la lecture du texte de théâtre et le travail qui consiste à supposer une actualisation du texte par des corps, des actions, des mises en situation et en espace, en partant de ce que matériellement, concrètement, objectivement ou subjectivement dit le texte des personnages, de l’espace, du temps, des circonstances ou en projetant arbitrairement des éléments sur le texte pour le mettre à l’ « épreuve », au sens photographique du terme, c’est-à-dire mettre en place des lectures spectaculaires qui vont faire exister virtuellement des univers possibles. » (Barrière, Nadine [2011], Lire le texte de théâtre ou « l’insurrection du texte » : dispositifs de «lecture spectaculaire», p.73).

 


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