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Volkswagen Blues

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Volkswagen Blues
POULIN, Jacques
Par Amélie Gauvin-Latulippe


Nationalité de l'auteur : Québécoise
Genre : Littérature de jeunesse
Courant :
Siècle : 20e siècle
Groupe d'âge visé : Deuxième cycle secondaire
Auteur de la séquence : Amélie Gauvin-Latulippe
Date du dépôt : Hiver 2012


 

Justification et pertinence de l’œuvre

Jacques Poulin a écrit en 1984 l’œuvre Volkswagen blues [1] qui, encore aujourd’hui, est un roman faisant véritablement partie du patrimoine québécois. En effet, cette œuvre est très souvent étudiée et analysée en cinquième secondaire ainsi qu’au cégep. Dans ce cadre-ci, cette séquence d’enseignement s’adressera principalement à des élèves de troisième secondaire. Jacques Poulin est un auteur influent de la littérature québécoise et crée de véritables chefs-d’œuvre littéraires et culturels depuis 1967. Volkswagen blues est sans aucun doute une œuvre intéressante et pertinente à travailler avec les élèves du deuxième cycle du secondaire. D’abord, le vocabulaire, le lexique, le style d’écriture et la narration sont tout à fait accessibles et compréhensibles pour des adolescents. De plus, l’amour, le voyage, l’aventure et la liberté sont des thèmes importants abordés dans cette œuvre, ce qui rejoint particulièrement l’univers et les gouts des adolescents. Ensuite, le roman est composé de deux personnages originaux, attachants et colorés, soit un homme et une femme, auxquels les jeunes peuvent facilement s’identifier. Au fil du récit, les élèves parcourront et découvriront le monde en lisant cette œuvre riche de Jacques Poulin. Par le fait même, cela leur permettra d’élargir leurs connaissances générales, surtout en matière de géographie. Enfin, ce récit de voyage est un roman initiatique. En effet, Jack, le personnage principal de l’histoire, vise une quête bien précise : retrouver son frère Théo qu’il n’a pas vu depuis vingt ans. Ainsi, l’intrigue très accrocheuse de cette quête captivera les élèves. En somme, Volkswagen Blues « est un récit en forme de conte, mais de conte actuel et concret » écrit avec un ton chaud qui porte la vie [2].  Cette œuvre riche, remplie d’humanité, d’amour et de découverte de soi est tout à fait pertinente à explorer avec des adolescents.

 

Comme le récit de voyage n’est pas un genre (mais plutôt une pratique littéraire [3]) très étudié et analysé au secondaire, les élèves éprouveront certains problèmes de lecture en lisant l’œuvre. Bien que la narration et l’histoire soient très linéaires, le récit de voyage à l’étude comporte plusieurs difficultés.

 

Voici donc les trois objectifs que les élèves devront réaliser pendant cette séquence d’enseignement :

1. Comprendre la progression des évènements dans le récit;

2. Analyser les indices d’intertextualité dans le récit;

3. Prendre conscience que la quête de Jack est beaucoup plus orientée sur la recherche de son identité que sur le désir de retrouver son frère.

 

 

Avant la lecture

 

Activité 1 - Mise en contexte du récit de voyage, de l’œuvre Volkswagen Blues et de l’auteur Jacques Poulin

Avant de commencer la lecture du roman, l’enseignant fera une mise en contexte du récit de voyage, de Volkswagen Blues et de Jacques Poulin. Cependant, avant d’intégrer l’œuvre et de parler de celle-ci, il posera quelques questions générales aux élèves afin de vérifier leur intérêt pour le thème du voyage.

- Connaissez-vous l’œuvre Volkswagen Blues et l’auteur Jacques Poulin?

- Avez-vous déjà lu des récits de voyage? Si oui, lesquels? Avez-vous apprécié?

- Avez-vous déjà voyagé? Comment vous sentiez-vous lorsque vous voyagiez?

- Avez-vous aimé voyager? Voudriez-vous voyager à nouveau? Où aimeriez-vous aller?

 

À la suite de cette discussion animée, l’enseignant mentionnera que le récit de voyage, « qu’il soit fictif ou réel, touche également au voyage initiatique. Le voyageur quitte la sphère du connu pour plonger dans l’inconnu et s’engager dans une quête [4]. » L’enseignant spécifiera également la provenance du récit de voyage en mentionnant que c’est en 1957, avec le roman Sur la route de Jack Kerouac, que le premier « road novel » est crée [5]. Par la suite, l’enseignant contextualisera véritablement le roman Volkswagen Blues dans le but de préparer les élèves à la lecture. La méthode qu’il utilisera pour mener cette activité sera orientée vers l’exposé magistral. L’enseignant précisera en premier lieu que le livre est un récit de voyage écrit en 1984 par Jacques Poulin, un auteur québécois. En deuxième lieu, l’enseignant donnera de l’information sur les caractéristiques génériques du roman. Par exemple, il parlera brièvement des deux personnages principaux de l’œuvre, soit Jack et La Grande Sauterelle, et mentionnera les lieux importants visités au cours du roman (Gaspé, Toronto, Detroit, Chicago, St-Louis, Kansas City, la piste de l’Oregon et San Francisco [6]). En troisième lieu, l’enseignant expliquera aux élèves les grands thèmes importants du récit, soit la quête vers le bonheur, l’amour, le voyage, l’aventure, la liberté et la découverte de l’autre. Finalement, il terminera la discussion en précisant aux élèves que le roman véhicule une morale importante et qu’il est impératif de porter une attention particulière à cette quête du bonheur lors de leur lecture. Afin que les élèves saisissent bien ce qu’est l’œuvre Volkswagen Blues, l’enseignant présentera également l’auteur Jacques Poulin. Puisque ce dernier est un homme qui a beaucoup voyagé au cours de sa vie, l’enseignant mettra l’accent sur le fait qu’en littérature, les œuvres sont généralement influencées par la vie des auteurs, par leurs expériences, par leurs voyages, par des écrits, par des lectures, et que « le décodage d’un texte se fait souvent à l’aide d’autres textes[7]. » Étant lui-même né à Québec et s’étant lui aussi exilé toute sa vie pour finalement revenir à Québec, on se rend bien compte, lors de la lecture de Volkswagen Blues, que Poulin met en histoire sa vie à travers le personnage de Jack. En effet, ce récit de voyage est véritablement une œuvre autobiographique de Jacques Poulin et on assiste à plusieurs ressemblances flagrantes entre ce dernier et le personnage de Jack. Le personnage que Poulin met en scène dans ses romans se prénomme « parfois Jack, il lui arrive d'être écrivain, il a les go[u]ts littéraires de l'auteur et son apparence physique est très proche de celle de Poulin lui-même. Il est alors tentant de s'imaginer que l'auteur a vécu les aventures de son personnage, encore plus si on sait que Poulin a fait la traversée des États-Unis en camionnette Volkswagen, comme le Jack Waterman de Volkswagen blues![8] » Ainsi, il est important que les élèves comprennent bien ce parallèle entre Jack de Volkswagen Blues et Jacques Poulin. Ces derniers doivent prendre conscience que l’écriture d’un auteur est fortement influencée par ses aspirations, par ses idées, par ses expériences, bref par sa vie.

 

Activité 2 - Analyse de la page couverture et du titre

Maintenant que les élèves sont conscients que Volkswagen Blues est un récit de voyage dans lequel deux personnages principaux sont mis en scène et dans lequel une quête identitaire est mise en évidence, les élèves devront maintenant analyser l’image de la page couverture ainsi que le titre. Évidemment, comme le thème du voyage inspire l’aventure, les découvertes et la liberté, les élèves devront ainsi s’abandonner et puiser dans leur imaginaire afin de répondre à la consigne de cette activité d’interprétation et d’écriture. Le but de cette activité est d’amener les élèves à faire des hypothèses de lecture, et ce, en se référant uniquement à l’illustration et au titre. En effet, dans la classe de français, « construire des hypothèses, c’est faire œuvre à la fois d’imagination et de rigueur, c’est mettre en branle toute la mécanique perceptive de l’esprit [9]. » De cette façon, les élèves pourront laisser place à leur originalité et à leur créativité. L’enseignant guidera ces derniers avant qu’ils ne commencent à écrire et leur posera quelques questions :

  • - Pourquoi le mot «Volkswagen»apparait-il dans le titre?
  • - Que signifie le mot«blues»?
  • - Que représente le ciel sur la page couverture?

 

Par la suite, l’enseignant donnera la consigne d’écriture.

 

Consigne : En analysant l’image de la page couverture et le titre du roman, écrivez un court texte de 150 mots en faisant des hypothèses sur le récit.

 

À la suite de cette tâche d’écriture, les élèves se mettront en équipe de trois dans le but de discuter de l’interprétation qu’ils ont faite du titre et de l’image de la page couverture. Ils expliqueront leurs hypothèses de lecture à leurs camarades et recevront également les leurs. Ainsi, avant même d’avoir commencé leur lecture, les élèves auront en tête plusieurs hypothèses, ce qui les incitera à les valider au cours du récit. De plus, ce travail permettra aux élèves de développer leur compétence à l’oral, puisqu’ils devront résumer leur texte de 150 mots à leurs camarades de classe. À la toute fin de la séquence d’enseignement, l’enseignant reviendra sur les hypothèses de lecture et les élèves pourront infirmer ou confirmer ce qu’ils avaient déterminé comme interprétation de l’image et du titre avant même d’avoir lu l’œuvre.

 

 

Pendant la lecture

 

Activité 3 - Compléter une ligne du temps pour comprendre la progression des évènements dans le récit

L’une des caractéristiques du récit de voyage implique une « chronologie explicite (datation précise […]) ou implicite (succession logique des év[è]nements dans le temps) et sous-tend la structure du texte (départ, itinéraire spatial logique, retour [10]). » Dans le roman Volkswagen Blues, Jacques Poulin décrit plusieurs lieux, provinces et états importants qui sont visités et découverts par les personnages principaux Jack et la Grande Sauterelle. Ainsi, au fil de la lecture, il peut être difficile pour les élèves de rester attentifs aux nombreux déplacements de ces deux protagonistes. Évidemment, cela entrave la progression des évènements dans le récit. Concernant le trajet des deux personnages principaux, ces derniers partent de la Gaspésie au Canada et terminent leur voyage à San Francisco aux États-Unis. Afin d’amener les élèves à ne pas perdre le fil conducteur du roman, l’enseignant arrêtera ceux-ci en cours de lecture dans le but de leur donner des stratégies pour parvenir à bien comprendre cette progression. Pour ce faire, il analysera le chapitre 3 du roman, soit Un coup de fil de Sam Peckinpah. L’enseignant procèdera par enseignement stratégique, c’est-à-dire qu’il cherchera à aider les élèves à développer des stratégies efficaces et économiques dans le but que ces derniers puissent réinvestir ces connaissances acquises en se posant les questions appropriées lors d’autres activités semblables [11]. L’enseignant analysera un chapitre avec les élèves afin que ces derniers puissent, par la suite, effectuer la tâche seul. La page 31 du chapitre 3 annonce l’arrivée de Jack et de la Grande Sauterelle dans la ville de Québec. Les élèves pourront voir textuellement que les personnages sont arrivés à destination, mais un champ lexical de la ville de Québec sera également décrit : Château Frontenac, terrasse Dufferin, place d’Armes, ile d’Orléans, fleuve St-Laurent, etc. C’est avec cette analyse du lexique que les élèves pourront véritablement comprendre l’environnement dans lequel les personnages principaux se trouvent. Ainsi, les élèves pourront beaucoup plus facilement se représenter et se conceptualiser les lieux. Après que l’enseignant et les élèves aient relevé le champ lexical ayant un lien avec le Québec, il ajoutera quelques précisions dans le but de bien les guider pour les prochaines activités qu’ils devront faire individuellement. D’abord, il mentionnera que les chapitres sont importants dans un récit et que, bien souvent, ces derniers annoncent de nouvelles informations. L’enseignant pourra leur donner l’exemple du chapitre 10, soit Al Capone, Auguste Renoir et le prix Nobel qui commence ainsi : « le sentiment de tristesse qui s’était emparé d’eux à Detroit se dissipa au cours de la nuit, quelque part sur la route entre le lac Érié et le lac Michigan, et ils étaient détendus, confiants et presque heureux malgré la fatigue lorsqu’ils arrivèrent à Chicago vers deux heures du matin » [12] (p. 111) ».

 

Avec cet extrait, les élèves pourront voir que le début de ce chapitre amène une information importante sur une nouvelle destination fréquentée par les personnages principaux. L’enseignant pourra également amener les élèves à être attentifs aux changements d’environnements, et ce, au sein même du récit. Par exemple, il leur mentionnera qu’un changement de température ou un changement de langue peuvent être des signes d’une nouvelle destination de voyage. Afin de leur faire comprendre ce changement d’environnement, l’enseignant prendra l’exemple du chapitre 8, soit Un endroit bien tranquille où Jack et la Grande Sauterelle doivent passer les douanes américaines. Voici donc l’extrait à analyser :

 

Extrait 1

 

- Where are you from? demanda l’agent des douanes.

- Québec, dit Jack.

- Where are you heading?

- Saint Louis, Missouri.

- How long will you be there?

- I don’t know.

Extrait 2

 

« Il était plus de quatre heures de l’après-midi et, derrière le Volks, une longue file d’automobilistes attendaient leur tour de passer la frontière entre Windsor et Detroit » (p. 97).

 

 

Ainsi, il sera plus facile pour les élèves de prendre conscience que les personnages principaux arrivent dans une nouvelle ville étant donné la langue anglaise qui est utilisée au début du chapitre. Après avoir analysé les chapitres 3, 8 et 10 avec les élèves, l’enseignant leur distribuera une feuille sur laquelle ils pourront tracer une ligne du temps. Donc, au cours de leur lecture, ces derniers inscriront les nouveaux lieux visités par Jack et par la Grande Sauterelle. Cet outil les amènera à se conceptualiser et à se représenter le voyage des deux personnages. Pendant la lecture, l’enseignant arrêtera les élèves à nouveau et les placera en équipe de trois dans le but que ces derniers comparent leur ligne du temps avec leurs camarades de classe. Ce n’est qu’à la fin de la lecture que l’enseignant corrigera la ligne du temps avec les élèves. Pour compléter l’activité, il projettera la carte de l’Amérique sur le rétroprojecteur de la classe et tracera, avec l’aide des élèves, le chemin parcouru par les deux personnages de Volkswagen Blues. Ainsi, les élèves pourront véritablement se représenter le chemin que les deux personnages principaux auront parcouru au fil de leur périple.

 

Activité 4 - Rechercher des liens intertextuels et analyser des chapitres

Ce qui caractérise les écrits de Jacques Poulin, c’est véritablement l’intertextualité qui se retrouve à l’intérieur de ses romans. En effet, « les différents romans de Poulin renvoient les uns aux autres. Quand on lit n’importe lequel d’entre eux, "cela sent le Poul(a)in"…[13] » De plus, « on verra que c’est à partir de la lecture de textes historiques et de textes romanesques américains que s’écrit Volkswagen Blues[14]. » L’intertextualité en littérature est un phénomène très intéressant et Jacques Poulin utilise beaucoup cette stratégie d’écriture. Comme ce concept n’est pas évident à maitriser pour des élèves du secondaire, l’enseignant devra d’abord leur expliquer en quoi consiste l’intertextualité. Par exemple, il définira ce concept en leur disant que chaque texte écrit par un auteur « réfléchit d’autres textes, c’est-à-dire qu’il y a des traces dans une œuvre donnée des lectures de son auteur [15]. » Ainsi, l’enseignant insistera sur le fait qu’en littérature, une œuvre est toujours beaucoup plus riche et intéressante lorsque l’auteur fait référence à d’autres écrits, à des personnages historiques ou à des lieux mythiques. En lisant l’œuvre Volkswagen Blues, les élèves observeront plusieurs liens intertextuels qui les amèneront à développer leurs connaissances historiques et leur culture générale. Dans Volkswagen Blues, Jack est un écrivain et cite fréquemment des livres, des auteurs et des personnages historiques au fil du récit. Lors de la lecture, beaucoup d’élèves ne pourront être en mesure de saisir toutes les références du texte. Cette activité vise donc la compréhension des liens intertextuels par les élèves dans le but que ces derniers comprennent mieux le récit. Pour amener les élèves à réaliser cet objectif, l’enseignant les arrêtera dans leur lecture et analysera avec eux le chapitre 4, soit L’écrivain idéal. Pour ce faire, il lira les treize pages à haute voix devant les élèves et s’arrêtera particulièrement sur l’extrait suivant :

 

Elle lisait un livre de Gabrielle Roy, Fragiles Lumières de la terre (p. 45.).

 

À cet instant, l’enseignant questionnera les élèves :

  • - Qui est Gabrielle Roy? Connaissez-vous des œuvres de cette auteure?
  • - Qui a déjà lu des œuvres de Gabrielle Roy?
  • - Pourquoi Jacques Poulin a-t-il décidé de citer un livre de Gabrielle Roy dans son roman Volkswagen Blues? Quel message veut-il faire passer?

 

Dans le but de répondre à toutes ces questions, l’enseignant réunira les élèves en équipe de deux et les amènera au local informatique. Ces derniers devront faire des recherches sur Gabrielle Roy et se renseigner sur les œuvres qu’elle a écrites au cours de sa vie. Par la suite, lors du retour en classe, l’enseignant demandera à chacune des équipes de donner l’information sur cette auteure. Il cherchera à faire prendre conscience aux élèves que la mission de Jacques Poulin est de donner le plus de références culturelles possible et de rendre son œuvre riche et intéressante. En effet, en citant un livre de Gabrielle Roy, Jacques Poulin donne plus de crédibilité à son roman, mais amène aussi un aspect culturel important. Les lecteurs curieux pourront être beaucoup plus cultivés à la fin de la lecture de ce roman. En intégrant l’auteure québécoise Gabrielle Roy dans le récit, Jacques Poulin fait un clin d’œil à une grande auteure québécoise et populaire de 1954 à 1982. On peut donc penser qu’il veut lui rendre un certain hommage en la citant dans Volkswagen Blues, puisque « c’est le premier roman où le nom de la romancière est évoqué, ainsi que le titre d’un de ses livres [16]. » Par ailleurs, lorsque l’on compare la date de parution de Volkswagen Blues avec le décès de Gabrielle Roy, on se rend compte que le récit de voyage de Jacques Poulin a été publié un an après la mort de cette grande auteure. Maintenant que les élèves savent ce que sont les liens intertextuels dans un texte et qu’ils sont conscients que Jacques Poulin utilise beaucoup cette stratégie d’écriture, ce sera maintenant à leur tour de comprendre les liens intertextuels du roman. Pour ce faire, l’enseignant divisera la classe en trois groupes et imposera à chacun de ces groupes un chapitre à analyser. Le groupe 1 analysera le chapitre 2, soit La légende de l’ « Eldorado ». Le chapitre 6, soit Une discussion sur Étienne Brûlé, sera attribué au groupe 2. Pour terminer, les élèves du groupe 3 devront analyser le chapitre 29, soit Les fantômes de San Francisco. Les élèves de ce groupe devront particulièrement analyser l’extrait des pages 282 et 283 où les personnages principaux discutent de Jack Kerouac. Ainsi, à la maison, les élèves devront se renseigner sur la légende de l’Eldorado ou sur Étienne Brûlé ou sur Jack Kerouac afin de présenter, de façon individuelle, les résultats de leurs recherches à l’enseignant. En effet, en deux minutes, chaque élève devra expliquer et interpréter les raisons pour lesquelles Jacques Poulin a décidé d’intégrer ces références précises et particulières dans son texte. Le but de cette activité est de faire développer une culture historique aux élèves et de les amener à beaucoup plus apprécier l’œuvre. Évidemment, lorsque les élèves ne comprennent pas les liens intertextuels d’un texte, il est facile pour eux de décrocher de l’histoire. À la suite de ces exposés, l’enseignant reviendra en plénière en expliquant brièvement en quoi consistent ces trois liens intertextuels.

 

Activité 5 - Comprendre la quête identitaire de Jack

Après avoir fait un travail sur la progression des évènements, sur les champs lexicaux et sur les liens intertextuels dans le récit, l’enseignant amènera les élèves à se concentrer davantage sur le contenu du roman. Cette activité visera principalement à faire comprendre aux élèves que la quête de Jack, qui est de retrouver son frère Théo, s’avère finalement à être une quête personnelle, identitaire, voire spirituelle. Pour réaliser cette activité, l’enseignant utilisera la méthode de la discussion en plénière. Ainsi, c’est véritablement par les questionnements et les interprétations des élèves que l’enseignant pourra constater s’ils comprennent bien le sens de la quête de Jack. Avant d’analyser comment cette quête se manifeste chez le héros du livre, l’enseignant devra d’abord amener les élèves à analyser le comportement de ce personnage au fil du récit. En effet, Jack a un mal de vivre et les élèves doivent être en mesure de repérer les extraits qui laissent sous-entendre que ce dernier n’est pas heureux dans la vie. Pour ce faire, l’enseignant lira, à haute voix, un passage du chapitre 15, soit Le complexe du scaphandrier. Afin que les élèves cernent bien ce qu’est le complexe du scaphandrier, l’enseignant lira d’abord l’extrait des pages 159-160, passage où Jack explique en quoi consiste ce concept.

 

Le complexe du scaphandrier, dit-il, c’est… un état pathologique dans lequel on se renferme quand on est en présence de difficultés qui paraissent insurmontables. Mais en réalité, on ne sait pas trop ce qui se passe, on agit d’une manière… instinctive. On sent qu’il est absolument nécessaire de se protéger, alors on s’enferme dans le scaphandre […]. On est vraiment très bien. On voudrait rester là toujours… Voilà, c’est tout. C’était le complexe du scaphandrier.

 

À la suite de la lecture de ce passage, les élèves pourront faire un parallèle entre le complexe du scaphandrier et la vie de Jack. Ils réaliseront que Jack se replie sur lui-même et n’est pas bien dans sa peau. Voici donc un autre passage intéressant que l’enseignant lira et analysera avec les élèves afin que ces derniers prennent conscience du sentiment de désespoir de Jack. « Deuxièmement, il se pourrait fort bien que je n’aie jamais aimé personne de toute ma vie. C’est assez triste à dire, mais je pense que c’est vrai. Et même, je pense que je n’aime pas la vie et que je ne m’aime pas moi-même » (p. 148).

 

Jack vit véritablement une période sombre dans laquelle il ne voit aucune issue pour être heureux dans sa vie. Ce dernier est réellement désemparé. La raison pour laquelle il prend la fuite est principalement orientée vers le fait qu’il part à la recherche de lui-même et de son identité. L’enseignant amènera les élèves à ce qu’ils comprennent que la quête de Jack, qui est de retrouver son frère Théo, n’est finalement qu’un simple prétexte. En effet, Jack se sent seul et part réellement à la recherche d’une meilleure vie pour contrer ce mal de vivre et cette solitude qui l’habitent. Au fil du récit, l’enseignant amènera les élèves à analyser les extraits qui stipulent que la quête de Jack est susceptible d’échouer. Certains extraits laissent sous-entendre que Jack ne retrouvera peut-être pas son frère Théo. Voici donc un passage important sur lequel l’enseignant insistera. « Troisièmement, dit-il, c’est à propos de mon frère Théo. C’est un peu plus compliqué et je ne suis pas certain d’avoir envie… […] Mon frère Théo, je ne l’ai pas vu depuis une vingtaine d’années, alors il est à moitié vrai et à moitié inventé » (p. 148-149).

 

Après avoir saisi en quoi consistait le complexe du scaphandrier et après avoir analysé deux extraits de ce chapitre, les élèves auront une bonne idée du comportement de Jack et de son attitude désemparée. C’est alors que l’enseignant pourra mettre l’accent sur l’adjuvant crucial et principal du roman : la Grande Sauterelle. En effet, cette dernière est constamment aux côtés de Jack pendant le voyage. Elle est d’une grande compagnie pour ce dernier, mais surtout d’une grande aide psychologique. L’enseignant fera remarquer aux élèves que, plus Jack et la Grande Sauterelle voyagent vers l’Ouest, c’est-à-dire, plus ils se rapprochent de leur destination, plus on voit une amélioration dans le comportement de Jack. Ce dernier semble plus heureux, plus libre, plus serein et, surtout, plus à l’aise avec lui-même. Par exemple, lorsque l’on compare la fin du roman avec le chapitre du scaphandrier qui se situe au milieu du livre, soit à la page 147, on peut véritablement constater une amélioration et une progression dans l’attitude de Jack. À la fin de l’œuvre, les élèves comprendront que Théo, le frère de Jack est handicapé et ne reconnait personne. C’est alors que Jack fera preuve d’une grande force, d’une certaine assurance et d’une confiance en lui, puisqu’il repartira seul à Montréal. En lisant l’extrait des pages 319-320, les élèves pourront voir que Jack a véritablement réussi sa quête : il est heureux malgré tout. Voici donc le passage sur lequel l’enseignant insistera. « Je… l’idée qu’il vaut mieux ne pas revoir mon frère… j’ai accepté cette idée tellement vite que…maintenant je me demande si j’aimais vraiment Théo. Peut-être que j’aimais seulement l’image que je m’étais faite de lui. [...] Il va falloir un beau jour que j’apprenne comment ça marche, les rapports entre les gens, dit-il. […] [L]orsqu’il entra tout seul dans l’aérogare, il souriait malgré tout. »

 

Pour clore l’activité, l’enseignant amènera les élèves à analyser le symbole de Théo. Il leur posera plusieurs questions.

- Que signifie «Théo» dans la mythologie grecque?

- Pourquoi Jacques Poulin a-t-il décidé de surnommer un des personnages du roman «Théo»?

- Qu’est-ce que Jacques Poulin cherchait à faire comprendre à ses lecteurs au cours du récit?

 

Les élèves seront donc amenés à faire de la recherche dans les dictionnaires ou dans Internet afin de comprendre véritablement le sens et le symbole de « Théo ». Dans la mythologie grecque, « Théo » signifie « Dieu ». Avec cette activité, l’enseignant aura pour but d’amener les élèves à ce qu’ils comprennent que finalement, Jack était d’abord à la recherche d’un dieu, d’une finalité à sa vie, d’une réponse, d’un signe. La quête de Jack a échoué, en quelque sorte, lorsqu’il s’est rendu compte que son frère était handicapé et ne le reconnaissait pas. Cependant, les élèves doivent être en mesure de comprendre que malgré tout, Jack a évolué et cheminé pendant ce voyage. Il a réussi une seconde quête, une quête identitaire, psychologique et spirituelle totalement différente de la quête de base.

 

 

Après la lecture

 

Activité 6 - Écrire un texte créatif

Maintenant que les élèves ont terminé leur lecture et sont conscients de la quête identitaire de Jack, ces derniers seront en mesure de constater que la quête principale du héros a échoué. En effet, Jack retrouve son frère Théo, mais ce dernier ne le reconnait pas puisqu’il est handicapé. Avec tous les signes que les élèves ont pu découvrir pendant l’activité 5, ils sont maintenant plus en mesure de comprendre que Jack ne cherchait pas nécessairement à retrouver son frère au cours de ce long voyage. De plus, à la fin du roman, Jack et la Grande Sauterelle se séparent. Jack retourne à Montréal alors que la Grande Sauterelle reste à San Francisco avec le Volkswagen.

 

Comme évaluation sommative, les élèves devront réaliser une activité d’écriture. Pour ce faire, chaque élève devra se mettre dans la peau de Jack et écrire une lettre à la Grande Sauterelle. Voici donc quelques pistes que les élèves pourraient explorer dans leur texte, et ce, en n’oubliant pas de se mettre dans la peau de Jack :

- expliquer son retour à Montréal;

- se remémorer le voyage en Volkswagen qu’il a fait avec la Grande Sauterelle;

- décrire ce qu’il a appris au cours de ce long voyage;

- expliquer en quoi il est maintenant un homme nouveau;

- remercier la Grande Sauterelle pour toute l’aide qu’elle lui a apportée.

 

Voici la consigne d’écriture.

- Jack revient à Montréal après son long voyage en Amérique. Il a l’occasion d’écrire une lettre à la Grande Sauterelle. Que lui dit-il? Mettez-vous dans la peau de Jack et écrivez un texte de 300 mots en utilisant le pronom personnel « je ».

 

Cette activité d’écriture laissera place à l’imagination et à la créativité des élèves. De plus, comme le roman ne comportait que deux personnages principaux, soit Jack et la Grande Sauterelle, l’activité d’écriture sera plus facile pour les élèves, puisqu’ils auront eu l’occasion de s’attacher à ces personnages au fil de leur lecture.

 

 

Conclusion

Avec le long travail d’analyse que les élèves auront réalisé à l’aide de l’œuvre Volkswagen Blues, ces derniers seront maintenant plus en mesure d’apprécier ce récit de voyage, puisqu’ils auront eu l’opportunité de travailler sur des interprétations et des symboles qu’ils n’auraient pu voir et comprendre s’ils avaient eu à lire le roman individuellement. En effet, l’enseignant a été d’une grande importance et d’une grande aide dans leur cheminement vers la compréhension de cette œuvre. Au terme de cette séquence, les élèves ont pu analyser le récit de voyage en profondeur. Ils ont également pu assimiler des stratégies pour comprendre la progression des évènements et les liens intertextuels dans un texte. De plus, ils ont pris connaissance que dans un récit de voyage, il y avait souvent des doubles quêtes et qu’elles étaient, dans la majorité des cas, orientées vers des quêtes identitaires et spirituelles. Puisque les élèves du secondaire ont un intérêt particulier pour l’aventure, la liberté et les voyages, l’enseignant pourrait clore la séquence d’enseignement en leur suggérant d’autres récits de voyage susceptibles de les intéresser. De cette façon, en plus de développer la culture des élèves, il leur donnera, par le fait même, le gout de la lecture. Chercher le vent [17] de Guillaume Vigneault, La tournée d’automne [18] de Jacques Poulin ou encore Asphalte et vodka [19] de Michel Vézina pourraient être des œuvres intéressantes à découvrir et à apprécier. Ainsi, les élèves pourraient comparer ces nouvelles œuvres à Volkswagen Blues et faire des liens avec les caractéristiques génériques de cette pratique littéraire qu’est le récit de voyage.

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

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VÉZINA, Michel, Asphalte et vodka, Québec, Québec/Amérique, 2005, 162 p.

VIGNEAULT, Guillaume, Chercher le vent, Québec, Boréal, 2003, 272 p.

 

 


[1] Jacques Poulin, Volkswagen Blues, Paris, Léméac / Actes Sud, 1988 ; Babel, 1998, 323 p.

[2] François Vasseur et Michelle Roy, « Voyage à travers l’Amérique : entrevue avec Jacques Poulin », dans Québec français, no 14, 1984, p.51.

[3] « [L]e récit de voyage n’est pas un "genre" au même titre que le roman, le théâtre ou la poésie, mais bien une "pratique littéraire" qui s’immisce dans plusieurs domaines de l’écriture. » François Couture, « Enseigner le récit de voyage : le monde dans une classe », dans Québec Français, no 112, 1999, p. 66.

[4] François Couture, « Enseigner le récit de voyage : le monde dans une classe », op. cit., p. 67.

[5] Pierre Monette, « Road novels : le roman route », dans Québec français, vol. 2, no 4, 2006, p. 30.

[6] Louise Milot, « Quand les "beaux-rêves" tournent au "blues" : le Volkswagen de Jacques Poulin », dans Québec français, no 35, 1984, p. 15.

[7] Anne Marie Miraglia, « Lecture, écriture et intertextualité dans Volkswagen Blues », dans Québec français, vol. 15, no 1, (43) 1989, p. 52.

[8] Gilles Perron, « Ces vies qu’on raconte », dans Québec français,  no 125, 2002, p. 41.

[9] Jean-Louis Dufays, Louis Gemenne et Dominique Ledur, Pour une lecture littéraire, 2e édition, Bruxelles, De Boeck, 2005, p. 212.

[10] François Couture, « Enseigner le récit de voyage : le monde dans une classe », op. cit., p. 67.

[11] Marie-Christine Paret, « Enseigner stratégiquement la grammaire », Québec français, no 119, automne 2000, dans  Document d’accompagnement, DID-2023 Didactique du français II, Québec, Université Laval, Faculté des sciences de l’éducation, hiver 2011, Texte 5 p. 14.

[12] Veuillez prendre en note que les extraits sont intégrés à même le texte et non en annexe. C’est la raison pour laquelle cette séquence d’enseignement contient plus de pages.

[13] Bianca Navarro Pardinas, « La représentation de la lecture chez Jacques Poulin », thèse de doctorat en littérature française, Montréal, Université McGill, 1992, p. 197-198.

[14] Anne Marie Miraglia, « Lecture, écriture et intertextualité dans Volkswagen Blues », op.cit.,  p. 54.

[15] Nathaly Ledoux, « La représentation de l’écrivain dans l’œuvre de Jacques Poulin », mémoire de ma[i]trise en langue et littérature française, Montréal, Université McGill, 1995, p. 10.

[16] Rébecca A.S. Richardson, « Gabrielle Roy dans l’univers de Jacques Poulin », mémoire de ma[i]trise en langue et littérature française, Montréal, Université McGill, 2006, p. 18.

[17] Guillaume Vigneault, Chercher le vent, Québec, Boréal, 2003, 272 p.

[18] Jacques Poulin, La tournée d’automne, Montréal, Léméac / Actes Sud 1993 ; Babel 1996, 191 p.

[19] Michel Vézina, Asphalte et vodka, Québec, Québec/Amérique, 2005, 162 p.

 


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