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Voyage en Irlande avec un parapluie

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Voyage en Irlande avec un parapluie
GAUTHIER, Louis
Par Gabriel Bouchard


Nationalité de l'auteur : Québécoise
Genre : Roman
Courant :
Siècle : 20e siècle
Groupe d'âge visé : Collégial
Auteur de la séquence : Gabriel Bouchard
Date du dépôt : Hiver 2005


Présentation de l'oeuvre à l'étude et de la séquence

Le livre Voyage en Irlande avec un parapluie1 de Louis Gauthier pourrait très bien figurer au programme d’un cours de littérature québécoise. Nous le croyons susceptible d’intéresser les jeunes adultes, ne serait-ce que par l’attrait du voyage. Il s’agit d’un texte relativement court qui ne présente pas de difficulté de lecture majeure, mais qui peut tout de même poser problème en ce sens qu’il apparaît comme inclassable. Le problème de lecture qui sera posé aux élèves consistera à déterminer si Voyage en Irlande avec un parapluie appartient au récit de voyage ou au roman. Pour poser ce problème de façon moins abstraite, nous avons imaginé une situation « réaliste » que nous soumettrons aux élèves : nous leur demanderons de se mettre dans la peau d’employés d’une grande librairie où la catégorie « Récit » n’existe pas et où le livre aurait été classé dans le rayon « Voyage ». Ils devront donc classer Voyage en Irlande avec un parapluie en décidant s’il ne vaudrait pas mieux opter pour la catégorie « Roman ».

Activité d'introduction

Dans le but de créer un premier contact avec les thèmes de l’œuvre à l’étude, mais aussi de préparer les élèves à être relativement déboutés par rapport aux préconceptions qu’ils pourraient entretenir à l’égard de l’Irlande et du récit de voyage, nous proposerons une activité d’écriture créatrice pendant laquelle ils devront imaginer qu’ils voyagent en Irlande. Il leur sera demandé de rédiger une carte postale en expliquant le choix de l’image qui y figurerait. Nous comparerons les textes produits avec un extrait du texte de Gauthier où le narrateur, lassé par la pluie, peste contre le cliché de la verte Irlande. Un extrait du film Trainspotting, où deux personnages confrontent leur vision de l’Irlande, viendra aussi illustrer le décalage qu’il y a souvent entre les stéréotypes véhiculés sur un pays et la réalité.

Premier bloc

Le premier bloc de notre séquence vise à amener les élèves à mieux situer Voyage en Irlande avec un parapluie par rapport à la pratique des récits de voyage. Nous commencerons par nous interroger, avec les élèves, sur le paratexte du livre. Nous nous soucierons du livre dans sa matérialité en demandant aux élèves de relever les différences entre Voyage en Irlande et les livres consacrés aux voyages relativement au titre, à la couverture, à la maison d’édition, etc.

Par la suite, nous soumettrons aux élèves des extraits de différents textes pouvant être rattachés au genre des récits de voyage2. Ils devront analyser ces extraits en équipe à l’aide de questionnaires qui attireront leur attention sur les thèmes abordés, l’intention de communication, la posture de narration, etc. Lors d’un retour en plénière, l’enseignant élaborera, à la lumière des résultats obtenus, une liste des caractéristiques propres aux récits de voyage. Les élèves reprendront alors l’activité en se livrant, à l’aide des mêmes questionnaires, mais aussi de la liste de caractéristiques obtenues, à l’analyse d’extraits de Voyage en Irlande3.

Une activité d’écriture créative pourrait aussi être envisagée dans le but de faire sentir de façon encore plus criante les « dérogations » de Gauthier aux caractéristiques du récit de voyage établies en classe. Nous pourrions demander aux élèves d’imaginer que le personnage de Voyage en Irlande soit devenu rédacteur chez Le guide du routard. Ils devraient alors, en équipe, concevoir et rédiger un pastiche où ce personnage conseillerait un hôtel, un restaurant ou un musée tout en conservant son style et ses préoccupations personnelles.

Pour faire apparaître l’importance accordée à la forme, nous procéderons à une analyse du traitement du temps et de l’espace dans les premières pages du roman. Après un bref exposé magistral consacré aux notions de temps du récit et de temps de la narration, les élèves auront à produire deux lignes du temps parallèles qui rendront compte du travail de mise en forme effectué par Gauthier. Les élèves devront recomposer la trame du récit en replaçant dans l’ordre les étapes du voyage (Montréal, New York, Londres, Irlande). Des extraits de films jouant sur ce type de « déconstruction » (Pulp Fiction, Kill Bill, 21 grams, etc.) seront alors présentés.

C’est avec une activité en plénière que se terminera ce bloc consacré à l’étude de Voyage en Irlande en regard des récits de voyage. L’enseignant demandera aux élèves ce qu’ils ont appris sur l’Irlande et ce qu’ils ont appris sur le personnage. En divisant le tableau en deux colonnes, l’enseignant y notera les éléments proposés par les élèves. Le résultat attendu est un déséquilibre en faveur de tout ce qui relève de la sphère intime du personnage et il importe, au terme de ce premier bloc consacré à l’étude de Voyage en Irlande en regard du récit de voyage, de relier ce résultat aux constats réalisés lors de toutes les autres activités.

Deuxième bloc

Nous estimons que la lecture du texte devrait être terminée au moment d’aborder le deuxième genre à l’étude, le genre romanesque. Nous tenterons d’abord de tracer les grands traits du héros romanesque à l’aide d’un bref exposé magistral ponctué d’exemples tirés de la culture populaire qui portera sur la hiérarchie des héros établie par Northrop Frye4. Une grille explicative sera remise aux élèves qui devront y situer des personnages qu’ils connaissent (Don Quichotte, Sherlock Holmes, etc.). La grille devrait leur permettre de situer le héros de roman qui se caractérise souvent par une qualité égale au lecteur et par une certaine inéquation par rapport à l’univers qui l’entoure. En se référant à cette grille, les élèves seront aussi en mesure de retrouver certaines constantes du genre chez le personnage de Voyage en Irlande.

Pour préparer les élèves à réinvestir ces nouvelles connaissances dans le cadre d’une dissertation, nous leur demanderons de produire le plan d’une dissertation à l’aide d’extraits du Voyage en Irlande et de passages tirés d’autres romans. Il pourra s’agir, par exemple, d’extraits de Don Quichotte de Cervantes, de La Métamorphose de Kafka ou de Salut Galarneau de Jacques Godbout. Les élèves devront élaborer un plan pour montrer comment les personnages des textes à l’étude sont en inéquation avec le monde qui les entoure.

Les extraits de romans utilisés lors de l’activité de la conception de plans pourraient être réutilisés pour effectuer un retour sur la notion d’intention. Les élèves pourraient retrouver leurs équipes pour tenter d’appliquer le schéma de la communication aux extraits de textes. Ainsi, les élèves auraient procédé, au cours de la séquence, à l’analyse de trois types d’extraits (des extraits de récits de voyage « purs », des extraits de Voyage en Irlande et des extraits de romans « purs »), ce qui leur permettra d’expliciter les divergences que présentent le récit de voyage et le roman en ce qui a trait à l’intention de communication et de situer Voyage en Irlande par rapport à ces deux pôles. Cette activité constituerait une forme de synthèse partielle qui nous permettrait de passer à un volet plus interprétatif.

Pour faire sentir la polysémie du genre romanesque, nous amènerons les élèves à élaborer une interprétation de l’œuvre à l’aide du modèle anthropologique du récit d’initiation. À l’aide d’exemples tirés des rites de passage célébrés autant dans des civilisations dites « primitives » que dans la nôtre (les initiations sportives et universitaires, par exemple) et de récits d’initiation connus (Jésus-Christ, Luke Skywalker, etc.), nous expliquerons aux élèves les trois grandes étapes du scénario d’initiation (préparation, mort symbolique, renaissance). Nous leur demanderons d’appliquer le modèle au roman de Louis Gauthier. Cette activité vise à donner aux élèves un cadre interprétatif relativement simple qui leur permettra de mieux comprendre Voyage en Irlande. Ainsi, ils pourront regarder le périple du personnage comme une quête spirituelle qui devrait trouver son aboutissement en Inde. Les « flashbacks » du texte s’expliqueront par le besoin d’une « préparation », et toute l’angoisse du personnage (solitude, sentiment de perte d’identité, etc.) se trouvera éclairée par l’hypothèse d’un passage obligé par la mortification pour atteindre un nouveau statut ou une nouvelle façon d’être en fin de parcours.

Évaluation finale

Notre séquence se terminera par la rédaction d’une dissertation critique. L’intitulé de la question reprendra essentiellement la mise en situation initiale, c’est-à-dire qu’il sera demandé aux élèves de se mettre dans la peau d’employés d’une librairie qui auraient à classer Voyage en Irlande avec un parapluie. Ils devront défendre leur position en utilisant les savoirs développés en classe et des citations du texte.

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1 Louis Gauthier, Voyage en Irlande avec un parapluie, Montréal, VLB, 1984.
2 Nous songeons à des textes consacrés par la tradition (Journal de Cartier, Relations de Brébeuf, etc.), mais aussi à des publicités d’agence de voyage, au Guide du routard, etc.
3 Nous pensons à des extraits tels que le passage à Londres chez Jim (pp. 23-24), la description de la traversée Angleterre-Irlande (pp. 26-27), la soirée chez Mrs. Fowley (pp. 29-30), les aléas du stop dans l’Irlande profonde (pp.48-49).
4 À l’instar d’Aristote, Northrop Frye établit une hiérarchie des héros de différents genres (mythe, tragédie, récit réaliste, comédie, etc.) en fonction de leur qualité. Cf. Dominique Combe, Les genres littéraires, Paris, hachette (Contours littéraires), 1992, p. 109.

On consultera avec profit :

CANVAT, Karl, Enseigner la littérature par les genres, Bruxelles, DeBoeck & Duculot (Savoirs en pratique), 1999.

CHELARD-MANDROUX, Isabelle et TAUVERON, Anne-Marie, Enseigner la lecture de l’œuvre littéraire au lycée, Paris, Armand Colin (Formation des enseignants), 1998.

DUFAYS, Jean-Louis, Stéréotype et lecture, Liège, Mardaga, 1994.

GOLDENSTEIN, Jean-Pierre, Entrées en littérature, Paris, Hachette (Autoformation), 1990.

------------------------------------, « Michel Strogoff : Initiation au récit, récit d’initiation », Pratiques, 1979, no 22-23, pp. 49 à 68.


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